"Je suis née à
quatre heures du matin, le 9 janvier 1908, dans une chambre aux meubles laqués
de blanc, qui donnait sur le boulevard Raspail."
La première fois que j’ai entendu parler de Simone de
Beauvoir, c’était au collège. Notre professeure de français, Melle J. avait
entrepris de nous faire étudier un passage des Mémoires d’une jeune fille rangée. J’en garde un souvenir poliment
ennuyé car en rien l’extrait, certainement convenable que nous lisions, ne m’a
touchée. Il faut dire aussi que ce n’était pas du tout une rigolote, Melle J. Austère
et très sévère, elle avait été élève de Simone de Beauvoir au lycée Jeanne d’Arc.
Elle en avait gardé une profonde admiration pour la femme de lettres et avait même
une certaine ressemblance avec elle, notamment le turban, mais plutôt la
version âgée.
Même si ce premier contact avec son œuvre fut distrait et
laborieux, il n’en demeure pas moins que je souhaite rendre hommage aujourd’hui
à l’auteure du Deuxième sexe. Grandrouen fustige l’absence de commémoration par les autorités locales. Personnellement,
je goûte peu ces manifestations pompeuses et soporifiques. Je vais plutôt vous
proposer un petit itinéraire spécial Simone de Beauvoir dans la ville. Cela
commence par la gare où elle attendait Jean-Paul Sartre, lui-même prof au Havre
(ou il écrivait La Nausée). Pour satisfaire
leur désir, ils allaient ensuite à l’hôtel de la Rochefoucauld , dans la
rue du même nom, face à l’église saint Romain. Ils buvaient un verre au
Métropole, elle enseignait la philosophie juste à côté, puisqu’à cette époque,
le lycée Jeanne d’Arc était installé à l’emplacement de l’actuel collège Barbey
d’Aurevilly. Plus tard, elle prendra une chambre à l’hôtel du Petit Mouton, lui
aussi situé dans la rue du même nom. Elle évoque dans La force de l’âge, cet établissement qui avait la particularité d’être
divisé en deux parties, moitié meublé, moitié bordel.
Ceci me permet de faire une transition douteuse avec cette
couverture du Nouvel Obs qui défraie la chronique. Finalement, c’est le thème
assez classique d’une femme à sa toilette. A l’évidence, cette vision du
postérieur du Castor émeut fortement nos amis les hommes. Montrer les fesses de
Simone de Beauvoir, est il le moyen ultime d’exprimer sa modernité ? La
féministe que je suis tousse un peu… Ainsi que le dit Ligne de fuite :
Parce qu’on
n’imagine pas un numéro spécial du Nouvel Obs avec en couverture les fesses de
Sartre … nous sommes en 2008,
l'U.R.S.S. n'existe plus, mais ce n’est pas encore
gagné, petites sœurs ...
Alors, puisqu’il est question de Sartre, je lui laisserai
rendre le meilleur hommage à sa compagne : « Simone de Beauvoir a
une communication idéale avec le public. Mettons si vous voulez une différence
entre elle et moi. Je ne communique pas émotionnellement, je communique avec
des gens qui réfléchissent, qui pensent, qui sont libres vis-à-vis de moi qui
pense... Simone de Beauvoir elle communique affectivement tout de suite avec
les gens. Il y a chez elle une manière de mettre tout de suite l'autre personne
en question, mais en amitié. Elle ne prend jamais de supériorité avec ses
lecteurs. La façon dont elle parle d'elle, c'est une façon de parler des autres...
Elle a des rapports très justes avec elle-même. C'est ça la distance à soi, ce
n'est pas seulement une question de littérature, c'est une question de vie. »
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