L’envie m’est venue à la suite
de deux billets : celui de Guy Birenbaum qui s’indigne d’une exposition
photo retraçant la vie à Paris sous l’Occupation et celui d’Embruns qui raconte
la vie à Paris pendant ces années là.
Je ne reprends pas la polémique.
Pendant la guerre, il était quasiment impossible de photographier, du coup, la
majorité des images qui nous parviennent ont été faites par des Allemands. Cette
expo à Paris et le billet d’Embruns me rappellent une recherche faite en 2004 à
Rouen où, avec le service patrimoine, nous avions été explorer la mémoire des
Rouennais dans la guerre. En prime, une collection de photos de la Bundesarchiv. Des
dizaines de témoignages, des objets quotidiens exhumés des placards familiaux,
des histoires terribles, des souvenirs de gosses ahurissants. Tout ça pour dire
que ces articles me donnent envie de raconter à mon tour ce qui s'est passé
dans ma ville à cette époque là. D'autant plus que nous arrivons à une date anniversaire
épouvantable, le 19 avril, où en une nuit, avec un bombardement allié qui rate
sa cible plus de 800 personnes périssent. Les survivants n'ont jamais oublié. En
2004, nous avons écouté des dizaines de Rouennais. Par la force des choses, nos
témoins étaient jeunes pendant la guerre, deux ou trois avaient passé la
vingtaine, la plupart d’entre eux étaient des enfants, des adolescents. Ils
nous ont confié leurs souvenirs, et souvent, l’émotion, enfouie, resurgissait
intacte, la voix se brisait, leurs yeux s’embuaient. Tout d’un coup, devant
nous, nous avions une fillette de huit ans, qui racontait comment, terrorisée,
en s’agrippant à la main de sa mère, elle fuyait sous les bombes. Ou ce gamin
inconscient qui jouait avec son frère parmi les bombes dont certaines n’avaient
pas éclaté. Ou encore cette jeune fille de seize ans, qui la nuit du 19 avril,
sous un arbre du square Verdrel, avait perdu une jambe.
Et ce que ces témoins m’ont
offert, sans le savoir, c’était une manière de m’approprier un moment de l’histoire
de ma cité qui m’échappait. Pendant la guerre, mes parents vivaient près de Dieppe.
J’ai longuement entendu parler du débarquement des Canadiens en 1942 mais la mémoire
familiale ne me racontait pas ce qui s’était passé dans ma ville natale. Nous
en avons même fait un bouquin, Rouen
mémoires 44. Edité à quelques centaines d’exemplaires, il a été offert, on
n’en trouve pas trace en librairie.
Ces temps ci j'étais en manque
d'inspiration avec ma ligne éditoriale originelle qui retraçait la construction
du Moudem. Là, en ce moment, les appels au peuple militant de son président
vierge et martyre, ça ne me cause pas des masses. Alors je crois bien que vais
raconter cette histoire rouennaise, mais en plusieurs billets, c'est une longue
histoire et cela s’intitulera « Ma ville sous l’occupation ». Et ça
commence demain.
C'est une très bonne idée que ces billets sur l'Occupation. Je les lirais bien volontiers.
Il y a quelques jours, je suis allé feuilleter le catalogue de l'exposition de la vie à Paris sous l'Occupation. Je trouve que c'est remarquable. La couleur nous fait voir un événement très proche en fait de nous. Avec le noir et blanc, on pense que ça ne nous concerne pas rééllement. Alors que là, on pourrait presque s'y voir.
Sinon je ne comprends vraiment pas la polémique qui est autour de cette expo.
C'est dommage que le livre Rouen mémoires 44
ne soit même pas consultable au format PDF.
C'est bien aussi de prendre du recul et d'interroger le passé.
Le présent est parfois si vide de sens...
Bien à toi.
Rédigé par : Monsieur Julien | 15 avril 2008 à 16:31
Coïncidence ! Au moment où je faisais un tour sur votre blog (et sur d'autres), je m'offrais une récré, étant en train de lire et d'annoter "Rouen captive", livre écrit par Maurice Poissant, maire de Rouen entre 1940-1943
Moi aussi je lirai avec grand intérêt vos billets ces jours-ci
Rédigé par : Sessyl | 15 avril 2008 à 16:50
@ Monsieur Julien :
Les photos dont je dispose sont en noir et blanc, mais tu verras, certaines sont saisissantes. Si tu es sage, je te prêterai le bouquin !
Bien à toi
@ Sessyl : j'aimerais bien le lire ce "Rouen captive", cela doit être passionnant... Comme je vous sais désormais ma lectrice et que je n'oublie pas que vous faisiez partie du comité scientifique de "Rouen mémoires 44", j'ai pas intérêt à raconter des bêtises dans les jours qui viennent !
Bien à vous
Rédigé par : Laure Leforestier | 15 avril 2008 à 17:32
Vous inquiétez pas !! Sur ce sujet- comme sur d'autres - je découvre surtout, et ceci en permanence
Lire Poissant est certes intéressant, ms tout de même démoralisant souvent. Par ex en 1942 il passe une bonne partie de son temps à supplier les Allemands d'alléger les sanctions tombant sur tel ou tel Rouennais, à "mendier", donc. comme il dit. Et en +, ambiance pénible de délation dans la ville
Rédigé par : Sessyl | 15 avril 2008 à 18:29
Quand Monsieur Julien aura terminé "Rouen Memoires 44" je te l'emprunterais bien à mon tour.
Je me souviens de l'expo qui était passionnante, cette série d'articles l'est tout autant, ils font écho à ce que mes parents me racontaient, eux qui ont vécu cette période, adolescents, dans la région du Mans.
Rédigé par : Matthieu Amelot | 16 avril 2008 à 14:40
C'est une très bonne idée !
Rédigé par : Toreador | 16 avril 2008 à 23:08
moi je verrais bien le livre réédité "Rouen, mémoire 44"...
Rédigé par : Florence | 21 avril 2008 à 21:56