à faire semblant d’y croire !
Je me suis toujours intéressée à la vie politique de mon pays
mais j’ai mis bien du temps avant de m’engager. Je m’engage bien pour les
affaires de la cité en devenant adjointe au maire de Rouen en 2001, mais je
reste fort longtemps jalouse de mon indépendance d’esprit et ne m’encarte pas. Et
puis un jour, en mai 2006, en écoutant un discours lors du vote de la motion de
censure au gouvernement Villepin, l’orateur me donne enfin un espace politique.
Quelqu’un qui dit :
Nous avons un
virus dans notre démocratie, qui empêche la démocratie de se défendre : c’est
l’absolutisme. Et la démocratie est incompatible avec l’absolutisme. (…) Dans la République absolutiste,
il n’y a plus qu’un but politique : contrôler le quartier général. À partir de
quoi, on installera ses hommes partout, ses réseaux partout. Tout le pouvoir
pour un clan et qui n’est pas avec moi est contre moi. D’où l’état de guerre
intestine, la guerre des clans pour contrôler l’Etat.
Quelqu’un qui dit aussi :
Je sais bien qu’il y a la discipline de parti. Je sais bien qu’il y a
les habitudes. Et je connais bien cette idée : « nous n’allons pas mélanger les
voix avec le Parti socialiste et les communistes… » … Eh bien, en effet, je
franchis un pas : j’accepte de voter, dans des circonstances nationales graves,
avec des gens qui sont différents de moi. Je ne renie rien de ces différences,
mais je les fais passer après l’intérêt national.
Enfin relisez tout le discours, moi ce jour là, je me suis
dit que je pourrais peut-être arrêter de voter blanc au 2e tour des
présidentielles (en 95 parce qu’en 2002 on n’avait pas le choix…). Faut croire
que je n’étais pas la seule à avoir entendu ces paroles, nous étions quelques
millions. La suite on la connaît, je m’encarte, ensuite les présidentielles
puis les législatives.
Et l’aventure ne cesse d’être passionnante parce que ce même
homme, candidat malheureux aux présidentielles, continue à nous en promettre de
jolies choses. Il dit ça par exemple le 24 mai 2007 :
Ce n’est pas une œuvre solitaire qui commence. J’ai voulu ce nouveau
mouvement, mais il n’est pas le mien. Je le porterai avec une équipe.
L’élection présidentielle, c’est forcément l’histoire d’un homme ou d’une femme
face à un peuple. Un mouvement, c’est au contraire une communauté humaine.
Et il ébauche les lignes d’un futur parti dont les bases
ne peuvent qu’emporter mon adhésion. Et même que ce beau parti du XXIe siècle,
on va le construire tous ensemble dans les semaines qui suivent, dans un grand
élan citoyen et un bouillonnement d’idées. Et on est un paquet à le croire à ce
moment là. Et je rencontre tout plein de gens tous aussi passionnants les uns
que les autres par leur parcours politique, professionnel, humain et je me dis
en cette époque de Sarkozie triomphante que nous pouvons ensemble construire
une alternative.
Aussitôt après, j’entends dans ma fédération : « Oh mais là, on est tous fatigués, faut se
reposer, on en reparle après les grandes vacances… » Bon, je trouve
ailleurs une bande de potes avec qui pendant l’été on s’attelle joyeusement à
lancer une vaste réflexion sur le fonctionnement de ce nouveau parti tout beau.
Cela s’appelle le cercle Méthodes, mais partout ailleurs en France, il y en a
plein d’autres qui planchent sur une charte éthique, une charte des valeurs et des
statuts. Il m’apparaît déjà, qu’au-delà du discours lénifiant sur les valeurs
partagées, la question du positionnement dans une France qui se révèle avec un
nouveau paysage politique doit se poser.
Arrive Seignosse et une première descente. Les discours
sont toujours bien beaux, mais du travail colossal fourni par les adhérents
pendant l’été, point ! Oh, quelques ateliers pour amuser la galerie mais
la suite nous prouvera qu’ils auront peu d’incidence sur la constitution du
mouvement.
Et pendant ce temps là, en Seine Maritime, la politique de
l’édredon est active (enfin passive agressive) pour étouffer toute remise en
cause des équilibres et rapports de force. Il n’est pas question de débat d’idées,
il est surtout question de garder des sièges. Nous sommes quelques uns à nous
agiter, à nous rencontrer, mais rien n’y fera et rien ne changera.
A l’approche du congrès fondateur, nombre d’adhérents
découvrent avec horreur les projets de statuts. A nouveau, une poignée de
volontaires, cette fois ci, les Démocrates en mouvement, se réunissent,
phosphorent, font des propositions d’amendements hyper raisonnables et déjà
bien loin de nos rêves, pour tenter de recoller à ce qui devient de plus en
plus une utopie de parti démocrate. J’assisterai, globalement écoeurée, à Villepinte,
à une mascarade de congrès et à l’adoption de statuts qui ressemblent à s’y méprendre à feue l’UDF (enfin, non, l’UDF n’est
pas morte, elle bouge encore, la suite de ma démonstration nous le prouvera). Dès
ce moment, la seule chose qui me retient encore dans ce parti, c’est la qualité
des personnes que j’ai pu croiser et l’envie de rester dans cette communauté.
J’allais oublier la pantalonnade des élections au conseil
national. Quelqu’un peut il m’expliquer l’urgence qu’il y avait à les mener puisqu’à
ce jour, les représentants élus n’ont toujours pas été appelés à siéger ? Vous
allez sans doute m’accuser de grosse paranoïa mais j’aurais tendance à croire
que c’était pour prendre au dépourvu tous ces nouveaux et reconduire les bonnes
vieilles structures UDF. Pas de bol, tous ces démocrates forcenés s’étaient
déjà constitués en réseaux, et c’est ainsi que les listes Régions en mouvement
ou la liste de Quitterie en Ile de France sont un peu venues bousculer la
donne.
Comme il n’y avait aucun positionnement clair, ces
élections municipales se sont révélées une farce
pour le Modem, ou une tragi-comédie
si l’on regarde un peu comment les adhérents se sont déchirés et partagés dans
une même ville et je citerai de manière non exhaustive Lyon, Bordeaux, Angers,
Strasbourg. A vous de compléter la liste au gré de vos propres expériences
locales. Le bilan est pathétique. Même si certains veulent encore y voir l’émergence
d’une nouvelle force politique, je crois que le citoyen électeur retiendra
surtout que pour un parti qui prônait de vouloir faire de la politique
autrement, le Modem aura été le champion de la cuisine électorale.
Et dans mon bled, il se passe quoi ? Ben rien !
Ils sont tous très fatigués ceux qui ont fait la campagne d’Albertini qui s’est
pris une branlée, alors ils ne veulent surtout pas de débriefing avant les vacances
de Pâques. Faut dire que les grandes manœuvres ont commencé, que les sénateurs
sont à l’ouvrage et je suis prête à parier que d’ici les européennes de 2009,
la « grande famille du centre » se sera retrouvée toujours au nom de
ces fameuses valeurs partagées.
Formidable ! Mais ce n’est pas mon truc… Au moins
cette année passée au centre avec une bande de gens toujours le cul entre deux
chaises, cette fauxculterie ne visant qu'à garantir toujours la même soupe aux
mêmes notables, cet aréopage de "nouveaux" aux dents au moins aussi
acérées que leurs aînés, m'aura rendu un immense service. Je sais désormais où me placer sur l'échiquier politique, je sais que je n'ai
pas besoin d'un gourou pour me montrer la voie, je sais que je suis un esprit
libre, bref je sais que je suis à gauche et que je n'ai plus rien à faire entre
les bisounours, les gros malins qui mènent leur barque et les salauds
professionnels.
Des grosses bises à tous ceux que j’ai eu plaisir à
rencontrer. Je n’ai pas envie de vous perdre de vue. Et bon courage à ceux qui
restent…
@ hervé : j'espère que le billet que je viens de publier répond à tes attentes. On est d'accord sur le constat, à nous d'en tirer ensemble des conclusions pour la suite.
Rédigé par : Laure Leforestier | 21 mars 2008 à 09:13
Laure,
Je t'aime.
Et j'espère que tu auras, après d'autres désillusions, envie de nous rejoindre.
On va se battre, on va prendre Bayrou du col et on va lui dire toute notre vérité.
Sans nous il n'existera pas mais nous sans lui pouvons mener notre lute a bon port.
Je t'attendrai avec espoir revenir a la maison(du modem).
Rédigé par : simbad | 21 mars 2008 à 15:59
Eh bien voilà ce que le MoDem aura permis de nous dire : nous sommes des gens de gauche. Nul besoin de nous cacher derrière notre petit doigt. Il faut se rendre à l'évidence. Ce n'est pas une maladie honteuse.
Pour ma part, j'étais juste désespéré de la situation au PS. Une adhésion pour dire qu'une autre politique est possible.
Finalement dans ce tout nouveau parti (et déjà si vieux dans sa mentalité), ce n'est pas plus brillant. L'udf n'est pas morte malheureusement...snif.
Heureusement, je ne suis pas déçu par Bayrou parce que je n'y ai jamais cru. Je pensais que le MoDem serait autre chose de plus progressite. L'humanisme a bon dos et en effet, comme ça a été dit, ça ne veut rien et tout dire. Une coquille vide qu'on bourre pour mieux faire passer le libéralisme ensuite.
C'est bien aussi d'être libre et d'être en phase avec nos véritables convictions.
Très respectueusement chère Laure et à bientôt.
Rédigé par : Monsieur Julien | 22 mars 2008 à 17:43
Le projet d'espoir est toujours là! Pas sur les estrades et les plateaux télé mais dans la tête de tous ceux qui comme vous Laure ont tant appris au contact de ces sans grades qui se sont réveillés au printemps 2007.
On a besoin de vous, de vos coups de gueulle, de vos doutes, de votre spontanéité.
Le MoDem a un an à peine, nous sommes plus nombreux que vous ne pensez au sein d'autres partis à regarder avec attention son évolution et, au fond d'espérer que ca marche.
SVP, ne zappez pas!
Rédigé par : Alcibiade | 24 mars 2008 à 17:16
je lis, et je vous dis, triste, triste, continuez à vous coucher et à oublier votre éthique et votre liberté de pensée.. la résistance vous ne devez pas savoir ce que cela veut dire, c'est pourtant graâce à celle que nous sommes libres aujourd'hui.. dommage pour vous et aussi pour nous mais , nous on continue...
Rédigé par : misol | 24 mars 2008 à 18:55
Les similitudes de vécus sont assez amusantes, mais pour moi c'est en sens inverse. Le MoDem à du mal avec l'UDF, l'UDF a du mal avec le MoDem...
L'erreur de base à été de vouloir créer une sorte d'UMP du centre. Pour ma part, je suis convaincu qu'une structure confédérale (MoDem en adhésion directe + UDF et CAP 21 continuant d'exister dans cette structure) ou bien la mise en place de courants permettant de structurer la diversité des sensibilités composant ce mouvement auraient été nécessaire.
On ne peut pas dire à tout le monde vous venez d'horizons différents, maintenant vous oubliez ça et êtes tous pareils...
Rédigé par : Arnaud Lehmann | 25 mars 2008 à 08:14
@ arnaud :
oui, à vous lire j'ai bien constaté que nous souffrions ... en sens inverse. Je n'étais pas pour le fédéralisme, mais de toute façon tout cela n'a plus beaucoup d'importance. Les semaines qui viennent devraient vous plaire car quoiqu'en disent certains sur les forums, les sénateurs UDF vont vous remettre tout ça au pas.
Amicalement
Rédigé par : Laure Leforestier | 25 mars 2008 à 09:17
Le manque de fidélité est précisément ce qui tue ce parti.
A tout ceux qui doutent, c'est normal vu la conjoncture.
A tout ceux qui remettraient en cause le leadership, je comprends, et j'approuve presque du bout des lèvres. Battons nous en interne, pas en quittant le parti.
Appelons à la réforme! Pas au sauve-qui-peut!
Les gens qui partent ne connaissent pas le sens de l'engagement. C'est comme le mariage : il y a des hauts, des bas.
Mais toujours, la rage d'avancer.
Construisons, ne fuyons pas.
Voix de Grenoble
Rédigé par : Ben | 25 mars 2008 à 11:58
Après la lecture du Monde,en lisant votre monologue, je suis rassurée car votre comportement affiché en politique n'est pas du tout celui que j'attends du mouvement démocrate et de ses adhérents : je ne me reconnais pas du tout dans votre approche nombriliste de la politique, ce "moi je" qui résonne très fort en vous lisant, et votre entrée en politique ressemble fort à une démarche de "consommatrice".
Un nouveau parti, c'est comme une nouvelle association, c'est avant tout "servir" des causes, avec tous les obstacles et les sacrifices que chacun consent pour faire avancer les choses, sans naïveté et sans vouloir à tout prix être payé de retour à brève échéance. Dans le département où je réside, le 78, j'ai plutôt la nette impression que nous sommes des pionniers et que là où nous nous sommes investis, les premiers résultats sont prometteurs : des élus dans des majorités, des équipes qui ont gagné en cohésion, des rencontres passionnantes que nous n'aurions jamais faites sans cela, des projets en commun...
Rédigé par : Vallee | 26 mars 2008 à 21:56
bonjour Laure,
je viens de prendre connaissance de ton post; je partage ton point de vue, notamment sur Seignosse où moi aussi, j'ai été très déçu du contenu (organisation, thèmes débattus); je suis également convaincu que l'utilisation des structures "udf" a peut-être facilité le lancement du Modem mais en a sérieusement perturbé les orientations; bien qu'ils s'en défendent, les anciens nous ont accueilli avec un peu de méfiance et ont d'abord veillé à conserver leurs "titres" d'où tous les dérapages que tu cites...Moi j'ai décidé de rester et de remettre une couche car je considère tout de même qu'en très peu de temps beaucoup de choses ont été faites! J'éspère que FB fera une analyse pragmatique de la situation et qu'il tiendra compte de cela : je crois d'ailleurs qu'il est allé trop loin dans sa volonté de faire bouger les choses et qu'un retour à la case départ lui serait définitivement fatal (je sais ça fait un peu pleonasme mais en politique...).
Rédigé par : cabernet | 27 mars 2008 à 08:50
Bonjour Laure,
Je n'ai pas un mot à enlever à ton texte. J'ai pris une décision à peu près similaire à la tienne et je l'ai annoncée sur mon blog, exactement pour les mêmes raisons.
Bon courage à toi.
Rédigé par : Franck Lelièvre | 27 mars 2008 à 11:16