Depuis que je ne suis plus élue en charge
du patrimoine, je me sens beaucoup plus libre pour m’exprimer sur ce sujet,
n’étant plus tenue par des obligations de bonnes relations avec notamment les
services de l’Etat.
Ce week-end arrivent comme toujours en
septembre les Journées du patrimoine. C’est toujours un franc succès et
l’occasion aussi pour les autorités de se rengorger des sommes dépensées pour
restaurer ce fameux patrimoine. Pas de quoi se réjouir pourtant quand on sait
l’état dramatique de la plupart de nos monuments. Et des sous pour le
restaurer, il n’y en pas et il n’y en aura pas.
L’exemple de Rouen est particulièrement
lourd : pléthore de bâtiments inscrits ou classés. Parmi ceux-ci bon nombre
appartiennent à la Ville. Il est plus facile d’énumérer ceux qui ne lui
appartiennent pas : la Cathédrale, le Palais de Justice, la chapelle du
Lycée Corneille. Restent (excusez du peu) : Saint-Ouen (un peu comme une
deuxième cathédrale par l’importance de son bâti), Saint-Maclou (toujours pas
remise des dommages de guerre), l’Aître Saint-Maclou (à se demander comment il
n’a pas encore brûlé étant donné l’usage qui en est fait), le Gros-Horloge
(ouf ! celui-là restauré…), le bureau des Finances (alias l’Office de
Tourisme), la Fierte Saint-Romain, l’église Saint-Laurent (alias le musée Le
Secq des Tournelles), le temple Saint-Eloi, les églises Saint-Romain,
Saint-Patrice, Saint-Godard, Saint-Nicaise, de la Madeleine… Je m’arrête là car
j’ai pitié de vous, la liste est encore longue.
Le plus inquiétant dans cette histoire
c’est qu’un grand nombre des bâtiments que j’ai cités présentent de véritables
problèmes quant à leur bon état de conservation. Alors un conseil d’amie, les
jours où le vent souffle à plus de 80 km/h, évitez les abords des monuments
historiques, histoire de pas vous prendre une gargouille sur le coin de la
figure…
Des moyens pour remédier à cette situation
qui, outre l’aspect parfois misérable, comme enfoui dans une gangue de crasse
de nos monuments, présente un vrai danger de salubrité publique (ben oui, les
églises à Rouen, elles ont tendance à être construites en plein cœur de ville,
là où il y a plein de gens et d’habitations) ? Des moyens il n’y en pas à
l’Etat qui de toute façon se préoccupe surtout du patrimoine dont il est
propriétaire. On peut toujours pleurnicher sur le clocheton manquant de la
flèche de la cathédrale et se disputer le privilège d’avoir obtenu que l’Etat
débourse 500 000 Euros pour une étude. Tout ça c’est peanuts par rapport
aux moyens qu’il faudrait mobiliser pour garantir que dans les décennies qui
viennent, les autorités locales n’auront pas à se trouver devant l’obligation
de mettre par terre quelques uns de nos monuments à moins qu’ils ne s’écroulent
tous seuls !
Jusqu’en 2006, il y avait ce que l’on
appelait le contrat de plan Etat-Région qui a permis de mobiliser ainsi les
fonds croisés de divers partenaires (Etat, Région, Conseil général, commune),
il y avait également une convention entre la Ville de Rouen, l’Etat et le
Conseil Général. Tout ceci a permis dans les dernières années les restaurations
du Gros-Horloge, de la flèche et la tour-lanterne de l’église Saint-Maclou,
d’une partie de la tour couronnée de Saint-Ouen. Aujourd’hui, il nous reste
surtout nos yeux pour pleurer…
Alors profitez bien quand même des Journées
du patrimoine et surtout des Dessous du Patrimoine, parce que je ne vous
garantis pas que cette nuit où le patrimoine se revisite en compagnie
d’artistes contemporains se pérennise. Déjà, l’évènement a eu chaud pour cette
année, le précédent Maire ayant peu apprécié le visuel de l’année dernière qui
(comble de la débauche !) montrait une culotte sur un radiateur. Et je ne
suis pas convaincue que l’actuelle municipalité kiffe particulièrement ce genre
d’occupation de l’espace public. Enfin, ce que j’en dis, rendez-vous l’année
prochaine, on verra bien.
Ah ! Sinon, il y a un truc que vous ne
pourrez pas visiter cette année, ce sont les « Verre et Acier » de
Marcel Lods à la Grand-Mare. Pourquoi donc ? Il semblerait que cette
visite ait été censurée par l’adjoint en charge de l’urbanisme. Etrange,
non ? De quoi qu’il se mêle allez vous me dire. Mon interprétation est
qu’il ne voit sans doute pas l’intérêt de valoriser une architecture qu’il
avait prévu, alors qu’il était Maire (1995-2001), de détruire. Et si
l’intention était à nouveau de les détruire ? Je n’affirme rien, mais je
m’interroge…
Et pour conclure, je réponds à cette
question qui vous taraude depuis que vous avez lu le titre de mon post. Le
patrimoine ? Il est en string si ce n’est à poil !
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