Elle démarre cette campagne européenne, les
candidats arpentent les régions « au plus près du terrain ».
J’apprends ainsi hier matin que Marine Le Pen donnait une conférence de presse
à Rouen pour présenter sa liste. Dans le cadre de notre aventure collective
Paris-Normandie, il m’apparaît aussitôt nécessaire d’aller y faire un tour. Je
n’ai aucune sympathie pour les extrêmes mais puisque le Front National fait
partie de l’offre démocratique, qu’il a toutes les chances d’envoyer au moins
un député à Bruxelles pour notre circonscription, il me semble essentiel
d’aller me rendre compte par moi-même de quoi il en retourne.
Stradefi m’accompagne dans cette
expédition. Quand nous arrivons, légèrement en retard, dans le salon d’un hôtel
rouennais, la pièce est remplie d’une quarantaine de personnes assises en
cercle le long des murs, entourant la tête de liste debout au pupitre. On nous
invite à nous asseoir tous deux au centre de la pièce, à une table de presse, à
côté d’une jeune femme armée d’un appareil photo. Un rapide coup d’œil me fait
réaliser qu’à part ma voisine assise à cette table, il n’y a aucun journaliste.
Aucun représentant de la presse locale, à part cette journaliste envoyée par Paris-Normandie,
n’a jugé utile de se déplacer…
Marine Le Pen démarre sa présentation en
affirmant sa confiance dans le scrutin, qui, elle n’en doute pas, permettra d’envoyer
deux représentants du Front National au Parlement Européen. Ce fut le cas pour
notre circonscription en 2004 mais à l’époque les électeurs désignaient 12
députés, ils n’en désigneront plus que 10 au mois de juin et les affaires du Front
sont moins florissantes depuis que l’actuel président de la République a ratissé
son fonds de commerce.
La candidate présente ses co-listiers, qui
se lèvent l’un après l’autre à l’appel de leur nom, et déroule sa stratégie de
campagne. Le discours surfe sur un violent euro-scepticisme, l’affiche de
campagne montre une bouée de sauvetage pour sortir de la mouise la France qui
coule. Je retiens surtout que la moitié des documents de campagne sera diffusée
dans les communes de moins de 1 000 habitants, au plus profond de la ruralité,
là où personne ne va jamais… Après, on se réveille un 22 avril avec la gueule
de bois et on se demande pourquoi les campagnes ont voté Le Pen !
Et puis, j’ai entendu et noté quelques
énormités. Comme par exemple le fait que la France perdrait son indépendance
énergétique à cause de l’Europe. Première nouvelle, je ne savais pas que mon
pays, grand utilisateur d’énergies fossiles était indépendant. Ensuite, le seul
moyen pour assurer cette « indépendance » serait-il de couvrir tout
le territoire d’un blanc manteau de centrales nucléaires ? Nous resterions
malgré tout dépendants de l’importation d’uranium… Un scoop aussi que je vous
délivre : « L’Europe a implosé. D’ailleurs l’Italie, la Grèce et l’Espagne
veulent sortir de l’Euro ». L’assistance, composée des co-listiers et d’adhérents
ne bronche pas, elle frémit même d’horreur quand l’oratrice nous annonce tout
de go que la Halde veut imposer 7 millions de travailleurs immigrés non-européens
(sous-entendu, mêmes pas blancs ceux-là !) à l’Europe. On nage dans la
confusion des genres et les contre-vérités. Les missions de la Halde concernent
la France et récemment cet organisme a posé la question des 6 millions d’emplois
administratifs fermés aux candidats qui ne possèderaient pas la nationalité
française.
La dame est habile. Elle présente bien,
elle a beaucoup appris de son modèle paternel mais elle offre un discours plus
policé. Et je me fais cette réflexion, moi fille aimante qui ait tant admiré et
respecté mon père, il vaut mille fois mieux être la fille de Jacques Delors que
celle de Jean-Marie Le Pen.
Et j’ai cette colère. Comment les médias
considèrent-ils aujourd’hui leur rôle d’information ? En relayant les
anecdotes people pour mieux vendre du papier ? Où étaient les journalistes
hier pour relater ensuite et rectifier les faits, pointer les contre-vérités ?
Ma démocratie est bien malaaaade….
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